C’est quasiment un nouveau type de biopsie liquide qui nous est proposé par cette équipe de la Fundação de Amparo à Pesquisa (São Paulo) en coordination avec des chercheurs de l'Université Claude Bernard (Lyon). Avec un nouveau biomarqueur, les monocytes, les plus grandes de nos cellules sanguines. Ces cellules pourraient en effet servir de «thermomètre» pour détecter le cancer du sein, suggèrent ces travaux présentés dans la revue Clinical and Translational Immunology : car les patientes développent des altérations dans ces leucocytes au stade initial de la maladie. La découverte ouvre la voie à un diagnostic et à un traitement améliorés de ces tumeurs largement répandues.
L’examen de ces cellules du système immunitaire dans le sang des patientes atteintes d'un cancer du sein permettrait non seulement de détecter la tumeur mais aussi de dater l'évolution de la maladie et d’adapter les stratégies d'immunothérapie de manière mieux personnalisée.
L'analyse d'un type de leucocytes, les monocytes, apporte une image de l'évolution de la maladie
Les monocytes sont les plus grandes cellules sanguines et représentent environ 7% des leucocytes. Ce sont des cellules immunitaires importantes qui patrouillent dans le corps à la recherche de menaces telles que les virus, les bactéries et les cellules tumorales. Produits dans la moelle osseuse, les leucocytes voyagent dans la circulation sanguine vers d'autres tissus où ils se différencient en macrophages (cellules qui dévorent les agents pathogènes et en cellules/déchets apoptotiques) ou en cellules dendritiques (cellules du système immunitaire présentatrices d'antigènes).
Des altérations typiques du cancer du sein : ici, les chercheurs collectent des monocytes dans le sang de patientes atteintes d'un cancer du sein et cherchent à les différencier en laboratoire en macrophages pro-inflammatoires (des cellules qui indiquent au système immunitaire d'envoyer des renforts au site tumoral). Ces monocytes ont été extraits à partir de 44 échantillons de sang de patientes atteintes d'un cancer du sein traités en France et au Brésil, ainsi que de 25 échantillons de témoins sains. Les scientifiques ont utilisé un cocktail de cytokines pour induire ces monocytes à se différencier en macrophages pro-inflammatoires. L'analyse identifie ainsi des altérations de plusieurs voies de signalisation, même chez des patients dont les cellules se sont différenciées en macrophages comme elles le devraient et comme chez des sujets sains.
Le cancer affecte tôt ces cellules immunitaires : ces résultats confirment que le cancer du sein n'est pas seulement une maladie locale. Le cancer affecte toutes les cellules de manière systémique et ces cellules de défense, les monocytes, sont déjà altérées lorsqu'elles pénètrent dans la circulation sanguine. Comment ces tumeurs interfèrent avec le système immunitaire reste mal compris, cependant les auteurs suggèrent que la sécrétion de certains facteurs de transcription (protéines spécifiques) dans le sang pourrait contribuer à l’altération des monocytes. Une autre hypothèse serait un effet systémique via la moelle osseuse, directement sur les cellules précurseurs des monocytes- une hypothèse plus difficile à vérifier.
Alors que cancer du sein, peut lui-aussi, se développer sur une période de plusieurs années, l’analyse des monocytes, possible via un simple test sanguin, et la détection d’altérations avant tout symptôme de la maladie permettrait d’inciter au dépistage et de traiter de manière plus précoce et mieux personnalisée.
Source: Clinical and Translational Immunology February 2020 DOI : 10.1002/cti2.1108 CD163+ tumor‐associated macrophage accumulation in breast cancer patients reflects both local differentiation signals and systemic skewing of monocytes
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