Ces nutritionnistes de l’Université Edith Cowan (Australie) décrivent ces composés présents au naturel dans certains aliments comme la salade, la betterave, le céleri, mais aussi dans le fromage, la volaille, le bœuf et le poisson, comme les « Dr. Jekyll and Mr. Hyde » de la santé humaine. Pour cause, les nitrates sont à la fois documentés comme bénéfiques pour la santé cardiovasculaire mais aussi comme facteurs de risque de cancer. Cette revue de la littérature publiée dans la revue Trends in Food Science & Technology, appelle à une meilleure compréhension des effets des nitrates, qu’ils soient ajoutés dans certains aliments transformés ou consommés via tout simplement des apports en légumes.
Le nitrate fait en effet partie des « ingrédients » de notre alimentation qui divisent toujours les experts en nutrition car peu de nutriments présentent à la fois des bénéfices et des risques aussi flagrants et bien documentés : le nitrate alimentaire présente des avantages pour la santé cardiovasculaire, ce qui peut contribuer à réduire le risque de maladies cardiaques, de démence et de diabète et, dans le même temps, des recherches ont montré qu’il pourrait être lié au risque de cancer.
Des risques et des avantages contrastés
L’étude : l’équipe du Dr Catherine Bondonno a mené une revue de la littérature publiée sur les nitrates et qui aboutit à une conclusion principale : la réponse doit être trouvée dans leur source : « Nous ingérons nitrate à partir de 3 sources alimentaires principales : la viande, l’eau et les légumes ». Un constat d’autant plus important que les recommandations actuelles relatives au nitrate datent des années 1970 et ne font pas la différence entre le nitrate issu de la viande, des légumes et de l’eau.
Les nitrates, cancérigènes ? De précédentes études, mais plutôt anciennes, et menées chez l’animal, ont montré qu’il pouvait former des N-nitrosamines, des composés hautement cancérigènes. Cependant aucune étude menée chez l’Homme n’a confirmé ce danger possible.
Les nitrates, favorables à la santé cardiovasculaire ? L’équipe relève de nombreuses études cliniques et observationnelles soutenant que les nitrates préviennent les maladies cardiovasculaires, mais lorsqu’ils proviennent des légumes. D’autres études révèlent que contrairement aux nitrates de la viande et de l’eau, les légumes riches en nitrates contiennent des niveaux élevés de vitamine C et/ou de polyphénols qui peuvent inhiber la formation de ces N-nitrosamines nocives associées au cancer. Enfin, il faut rappeler que la viande transformée en excès n’est pas favorable à la santé et que sa consommation devrait être limitée : mais est-ce ici nitrate qu’elle contient qui est en cause ou d’autres nutriments ? On l’ignore.
Seule conclusion possible à ce stade, les nitrates issus des légumes apparaissent plus bénéfiques.
D’autres recherches devront être menées afin que les directives puissent être réactualisées. Ce point est important car les maladies cardiaques restent la principale cause de décès et l’allégation d’un entre la consommation de nitrates et le cancer pourrait être un frein à la consommation de légumes, pourtant un facteur reconnu de prévention cardiovasculaire. Cependant, concluent les auteurs : « Nous devons nous assurer que les légumes riches en nitrates n’entrainent absolument aucune augmentation du risque de cancer, quels que soient les niveaux consommés ».
Et les suppléments à base de nitrates à forte dose ? De tels suppléments sont en effet largement utilisés pour améliorer les performances sportives et, par ailleurs des extraits de nitrate végétal sont également largement ajoutés aux produits de charcuterie avec la promesse d’être meilleurs pour la santé (que les nitrites). Aujourd’hui la science n’apporte pas la réponse, les preuves actuelles suggérant seulement que :
Une portion de légumes riche en nitrate « pourrait » être bénéfiques à la santé cardiovasculaire.
Toutes ces conclusions « au conditionnel » soutiennent l’importance de mener de nouvelles recherches sur les effets des nitrates alimentaires sur la santé.
Source: Trends in Food Science & Technology 21 March, 2023 DOI: 10.1016/j.tifs.2023.03.014 Nitrate: The Dr. Jekyll and Mr. Hyde of human health?