Ces données d’essai clinique confirment l’atteinte d’un objectif poursuivi par de nombreuses équipes de scientifiques depuis des dizaines d'années : un test sanguin, presque « universel », capable de détecter plus de 50 types de cancer. De plus ce test apparaît suffisamment précis pour être déployé en tant que test de dépistage multi-cancer chez les personnes à risque plus élevé de la maladie, y compris chez les patients âgés exempts de symptômes. Documenté dans les Annals of Oncology, ce test de détection précoce des cancers soutient en raison de son caractère peu invasif, un recours au dépistage élargi, en particulier chez les personnes présentant des facteurs de risque génétiques.
Les chercheurs du Glickman Urological and Kidney Institute, Cleveland Clinic rapportent que le test a détecté avec précision le cancer, souvent avant l'apparition des symptômes, tout en ayant un très faible taux de faux positifs. Le test a également prédit l'emplacement du cancer dans le corps avec un degré élevé de précision, ce qui va considérablement aider les médecins à choisir des tests de diagnostic efficaces.
« Détecter le cancer à un stade précoce, lorsque le traitement a plus de chances de réussir,
c’est un moyen majeur de réduire le fardeau du cancer », souligne l’auteur principal, le Dr Eric Klein, président du Glickman Urological and Kidney Institute.
Ces données suggèrent, qu’utilisé en amont des tests de dépistage existants, le test de détection multi-cancer pourrait avoir un impact profond sur les taux de dépistage et donc en Santé publique.
Toujours le principe de biopsie liquide : le test analyse l'ADN, connu sous le nom d'ADN acellulaire (cfDNA), que les tumeurs (et d'autres cellules) répandent dans le sang. Le séquençage génomique détecte des modifications chimiques de l'ADN appelées « méthylation » qui contrôlent l'expression des gènes, et repose sur un modèle d’apprentissage automatique pour détecter des schémas de méthylation anormaux suggérant la présence d'un cancer. Ce modèle d’apprentissage automatique permet également de préciser le site de la tumeur. Les résultats sont disponibles dans les 10 jours.
Il s’agit de la 3è vague de l’essai Circulating Cell-free Genome Atlas (CCGA) qui a analysé les performances du test chez 2.823 participants déjà diagnostiqués avec un cancer et 1.254 témoins exempts de cancer. Le test a permis de :
- détecter des signaux de tumeurs provenant de plus de 50 types de cancer différents,
- préciser le stade des cancer (I, II, III, IV),
- avec une sensibilité de 51,5%,
- une spécificité tait de 99,5 % (ce qui signifie un taux de faux positifs de seulement 0,5 %) ;
- la sensibilité atteint 67,6 % pour 12 cancers aux stades I-III concentrant environ les 2/3 des décès par cancer ;
- pour tous les cancers, la capacité de détection s'améliore avec le stade du cancer de 16,8 % au stade précoce I, 40,4 % au stade II, 77 % au stade III et 90,1 % au stade IV ;
- la sensibilité varie selon le type de cancer. Dans les tumeurs solides qui n'ont pas d'options de dépistage, comme les cancers de l'œsophage, du foie et du pancréas, la sensibilité globale du test s’avère 2 fois supérieure à celle des tumeurs solides qui ont des options de dépistage, comme les cancers du sein, de l'intestin, du col de l'utérus et de la prostate : 65,6 % contre 33,7% ;
- la sensibilité globale dans les cancers du sang, tels que le lymphome et le myélome s’élève à 55,1 %.
- Enfin, le test identifie le site de la tumeur dans 88,7 % des cas.
«Les cancers qui rejettent plus d’ADN acellulaire circulant dans le sang sont détectés plus facilement. Ces cancers sont également plus susceptibles d'être mortels »
Ces données soutiennent un peu plus l'utilisation du séquençage de nouvelle génération pour la détection de l'ADN acellulaire dans les échantillons de sang en tant qu'outil de détection précoce des cancers courants. Enfin, il est bien clair qu’un test de dépistage qui ne nécessite qu'une simple prise de sang présente de multiples avantages à la fois pour les patients et pour la santé publique.
Déjà sur le marché : Grail, Inc. (Californie), la société qui a développé ce test de détection précoce multi-cancer a obtenu son autorisation de mise sur le marché et le test est disponible aux États-Unis sur prescription et en complément des autres modes de dépistage standards pour les différents cancers. Mais le test permet aussi de détecter de nombreux cancers qui aujourd’hui ne « disposent » pas de méthode de dépistage, comme les cancers du foie, du pancréas et de l'œsophage, des cancers à très mauvais pronostic.
La biotech productrice du test vient de passer un partenariat avec le National Health Service du Royaume-Uni pour confirmer ces performances cliniques multi-cancers, et économiques, chez 165.000 patients éligibles.
« La détection précoce du cancer pourrait sauver des millions de vies dans le monde. Le développement de technologies qui répondent à ce problème est la première étape. Les prochaines étapes comprendront le développement de nouvelles interventions thérapeutiques. Et, en parallèle, des efforts majeurs de sensibilisation de la population doivent se poursuivre ».
Source: Annals of Oncology 24 June, 2021 DOI: 10.1016/j.annonc.2021.05.806 Clinical validation of a targeted methylation-based multi-cancer early detection test using an independent validation set
Plus sur Diagnostic Blog