Cette étude épidémiologique menée par une équipe du Massachusetts General Hospital (MGH) révèle des détails cruciaux sur les effets secondaires cutanés des immunothérapies du cancer : 10 affections cutanées apparaissent ainsi directement liées aux inhibiteurs des points de contrôle immunitaire. Les chercheurs caractérisent également dans le Journal of the American Academy of Dermatology, les patients les plus susceptibles de les développer ces toxicités cutanées.
Le principe des inhibiteurs de point de contrôle immunitaire est de bloquer les liaisons des points de contrôle immunitaires avec leurs ligands afin de libérer ou stimuler la réponse du système immunitaire contre les cellules tumorales. Ce type d’immunothérapie a transformé le traitement de nombreux cancers avancés, mais au fil des essais cliniques et des études observationnelles révélé différents effets secondaires, impliquant souvent la peau. Cette analyse plus complète représentative de la population précise l'étendue de ces effets secondaires et fournit des informations sur les patients qui sont plus susceptibles de les développer.
Ces affections s’accompagnent de symptômes handicapants
Le Dr Yevgeniy R. Semenov, chercheur au Département de Dermatologie au MGH rappelle que plus généralement, « les immunothérapies, qui incluent des inhibiteurs de point de contrôle immunitaire, sont une modalité de traitement de plus en plus courante pour les cancers avancés, avec plus de 200.000 patients qui bénéficient de thérapies chaque année aux Etats-Unis. Cependant, l'incidence des événements indésirables nécessite d’être précisée, ainsi que les types et la sévérité de ces effets. » Son équipe a adopté une approche de type « big data » pour préciser la prévalence (aux États-Unis) des effets secondaires cutanés, de leur délai d’apparition, et de leur prise en charge chez un large groupe de patients ayant reçu des inhibiteurs de point de contrôle immunitaire.
C’est via l’analyse des données de 8.637 patients traités avec ce type d’immunothérapie et référencés dans la base de données nationale d'assurance maladie vs un nombre égal de patients atteints de cancer mais n’ayant pas reçu ces médicaments (témoins) que les chercheurs ont pu évaluer l’incidence et la sévérité de ces effets de toxicité cutanée :
- l'incidence globale des effets secondaires cutanés s’élève à 25,1%,
- le délai médian d'apparition à 113 jours ;
- 10 des plus de 40 affections cutanées précédemment rapportées comme étant liées à des inhibiteurs de point de contrôle immunitaire sont en fait observées à une incidence plus élevée chez les patients prenant ces médicaments vs témoins ;
- ces affections s’accompagnent de symptômes de démangeaisons, d'inflammation, d'éruption cutanée, de perte de couleur de la peau, de gonflement ou de cloques ;
- les patients atteints de mélanome ou de cancer du rein et ceux recevant plusieurs types d'inhibiteurs de points de contrôle immunitaire encourent un risque plus élevé de développer ces problèmes cutanés ;
- les symptômes cutanés ont tendance à survenir « dans la vraie vie » plus tardivement que suggéré dans les essais cliniques ;
- les cliniciens prescrivent souvent des corticostéroïdes systémiques pour les traiter, alors que dans la grande majorité des cas, ces médicaments devraient être évités en raison du risque associé de réduction de l’efficacité antitumorale de l'immunothérapie.
Des résultats précieux, en pratique clinique, pour les dermatologues et les oncologues qui traitent des patients avec ces immunothérapies. Détecter ces 10 conditions cutanées permettrait d’améliorer la qualité des soins.
Le message est enfin celui d’une coordination entre les dermatologues et les oncologues pour optimiser l’évaluation de ces patients plus vulnérables et empêcher l’apparition de lésions cutanées plus sévères.
Source: Journal of the American Academy of Dermatology April 02, 2021 DOI: 10.1016/j.jaad.2021.03.094 Epidemiology and risk factors for the development of cutaneous toxicities in patients treated with immune checkpoint inhibitors: A United States population-level analysis
Lire aussi : IMMUNOTHÉRAPIE : Un vaccin anticancéreux universel et personnalisé
Plus sur Cancer Blog