Un vaccin à ADN à double action contre la tumeur : C’est ce que vient de développer une équipe de chercheurs de l'Abramson Cancer Center et de l'Université de Pennsylvanie. Il s’agit d’un vaccin thérapeutique, à ADN, qui, dans un premier temps, cible non pas les cellules tumorales mais une protéine clé de l’angiogenèse, le phénomène de vascularisation qui soutient le développement de la tumeur. Puis le vaccin cible dans un second temps la tumeur elle-même, grâce à un processus appelé « étalement des épitopes ». Une approche remarquable, expliquée dans le Journal of Clinical Investigation.
Attaquer le cancer indirectement, c'est la stratégie de ces chercheurs, qui, sur la souris, parviennent ici à ralentir la croissance tumorale. Alors que de précédentes approches ont ciblé l'angiogenèse tumorale soit la formation de nouveaux vaisseaux sanguins qui alimentent les cellules tumorales, mais avec des effets inévitables sur les processus de cicatrisation, ces chercheurs ont conçu un vaccin à ADN qui cible spécifiquement TEM1, une protéine de l'angiogenèse, surexprimée dans les tumeurs.
En ciblant TEM1, le vaccin réduit la vascularisation tumorale, favorise l'hypoxie de la tumeur et réduit la croissance de la tumeur. En injectant à des souris modèle de 3 types de cancers (sein, côlon, col de l'utérus) leur vaccin à ADN appelé TEM1 -TT (TEM1 inséré dans un fragment d'anatoxine tétanique -TT), ils montrent que la formation de la tumeur est retardée ou même bloquée. La croissance tumorale est stoppée via la diminution de l'angiogenèse.
Mais ce n'est pas tout, explique l'auteur principal, Andrea Facciabene, professeur au Centre de recherche du cancer de l'ovaire à la Penn Medicine.
Un processus d'étalement des épitopes amplifie la réponse immunitaire : Les chercheurs constatent que le vaccin à ADN, après avoir tué les cellules endothéliales qui forment les vaisseaux tumoraux et stoppé l'angiogenèse, entraîne ce qu'ils appellent un phénomène d'étalement des épitopes -ici des fragments de cellules tumorales mortes- reconnus par les anticorps qui déclenche une réponse immunitaire secondaire contre la tumeur elle-même. Un mécanisme d'étalement des épitopes déjà impliqué dans les maladies auto-immunes et inflammatoires chroniques. Au final, Le vaccin induit des cellules T spécifiques capables de combattre d'autres cellules tumorales exprimant d'autres protéines que TEM1, ce qui accroît son efficacité thérapeutique.
Cette nouvelle approche de vaccin à ADN contre le cancer montre un grand potentiel par rapport aux tentatives précédentes de vaccination génétique, qui ciblaient les cellules tumorales plutôt que les vaisseaux sanguins. De plus, sur la base de cette étude, sur l'animal, les effets secondaires ne semblent pas importants. Enfin, la prévalence de la protéine TEM1 dans un large éventail de types de tumeurs plaide pour le caractère prometteur de la cible, à la fois en stratégie prophylactique et thérapeutique, en complément des autres thérapies habituelles que sont la radiothérapie et la chimiothérapie.
Source: The Journal of Clinical Investigation April 1, 2014 doi:10.1172/JCI67382 Tumor endothelial marker 1–specific DNA vaccination targets tumor vasculature